par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 12 mars 2009, 08-10974
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
12 mars 2009, 08-10.974

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Entériner
Putatif




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen :

Vu les articles 201 du code civil, L. 353-1, L. 353-3 et R. 353-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'en cas de mariage d'un assuré suivi d'un second mariage nul mais déclaré putatif à l'égard du second époux, celui-ci a la qualité de conjoint survivant au sens des deux derniers de ces textes ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'Alberto X... étant décédé le 27 mars 1992, la caisse d'assurance vieillesse des artisans, aux droits de laquelle vient la caisse du régime social des indépendants d'Ile-de-France (la caisse), a servi une pension de réversion à Mme Y... que celui-ci avait épousée le 27 janvier 1979 au Portugal ; que Mme Z... ayant invoqué ultérieurement l'existence d'un mariage religieux avec Alberto X..., célébré le 28 août 1972 en Espagne et sollicité l'attribution de cet avantage, la caisse a supprimé le versement de la pension de réversion attribuée à Mme Y... et lui a réclamé le remboursement des arrérages déjà perçus ; que celle-ci a contesté cette décision devant la juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour rejeter cette contestation, l'arrêt retient que l'intéressée n'établit pas que le premier mariage de son époux avait été dissout avant le sien ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'étant appelée à se prononcer sur la qualité de conjoint survivant de la seconde épouse, elle devait surseoir à statuer en réservant à celle-ci la possibilité de saisir la juridiction compétente de la question de la nullité et de l'éventuelle putativité de son mariage, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er mars 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la caisse du régime social des indépendants d'Ile-de-France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse du régime social des indépendants d'Ile-de-France ; la condamne à payer à Mme Olinda Y..., épouse X..., la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat aux Conseils pour Mme Olinda Y..., épouse X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR REJETE la demande d'annulation de la décision prise par la Caisse d'assurance vieillesse des artisans, de suppression du versement d'une pension de réversion au profit de Madame Olinda Y..., épouse X... ;

AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE force est de constater que Monsieur X... était bigame et que compte tenu de la nationalité des premiers époux (portugaise et espagnole), laquelle leur interdisait de pratiquer la polygamie, le second mariage de Monsieur X... a nécessairement été célébré en fraude à la loi ; que contraire à la conception française de l'ordre public international, la bigamie avérée de Monsieur X... justifie que le second mariage de celui-ci ne puisse produire en France un quelconque effet ; que la requérante n'est pas fondée à soutenir que son mariage avec Monsieur Correia da Costa a été reconnu valable par les autorités judiciaires du Portugal alors qu'il est établi que les instances judiciaires de ce pays, saisies d'une demande d'annulation de son mariage par la première épouse de son conjoint, ont écarté cette prétention sans aborder le fond ;

ET AUX MOTIFS PROPRES QU'il n'est pas établi que le premier mariage de Monsieur X... avait été dissous antérieurement à son second mariage avec l'appelante de sorte que ce second mariage ne peut produire aucun effet notamment au plan du droit à une pension de réversion ; que le Consul général du Portugal à Paris a déclaré, le 24 octobre 2000, que le Tribunal de Santo Tirso, saisi par Madame Z... d'une demande d'annulation du mariage de M. X... avec Mme Y..., avait rejeté, le 24 avril 1994, sa demande en soulevant une exception de caducité, que le Tribunal de Relaçao (équivalent de la Cour d'appel) avait, le 6 octobre 1995, confirmé la décision rendue en première instance en retenant la prescription et que, le 16 septembre 1996, le Tribunal Suprême (équivalent de la Cour de cassation) avait rejeté sa prétention ; que si selon le Conseil de Mme X..., son mariage est régulier au regard des règles portugaises, force est de constater que celle-ci n'établit pas que le premier mariage de son époux avait été dissous avant le sien ;

ALORS D'UNE PART QUE selon l'article 47 du Code civil, tout acte de l'état civil des français ou étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclaré ne correspondent pas à la réalité ; qu'en refusant de donner foi à l'acte de mariage de Madame Olinda Y... et de Monsieur Alberto X... établi au Portugal le 27 janvier 1979, la Cour d'appel a violé le texte précité ;

ALORS D'AUTRE PART QUE c'est à celui qui conteste la validité d'un acte de mariage de rapporter la preuve de l'irrégularité qu'il allègue ; qu'il appartenait à la caisse de retraite, qui contestait la validité de l'acte de mariage de Madame Olinda Y... et de Monsieur Alberto X..., de démontrer l'absence de dissolution du précédent mariage antérieurement contracté par ce dernier ; qu'en exigeant de Madame Olinda Y... qu'elle rapporte la preuve de la dissolution du premier mariage de son époux antérieurement à la célébration du sien, et en lui faisant supporter le risque de cette preuve, la Cour d'appel a violé les articles 6 et 9 du Code de procédure civile, ensemble l'article 1315 du Code civil ;

ALORS DE SURCROIT QUE les jugements étrangers relatifs à l'état et à la capacité des personnes produisent de plano leurs effets en France ; qu'en refusant de faire produire ses effets à la décision en date du 16 septembre 1996 ayant entériné la validité du mariage de Monsieur X... et de Madame Olinda Y..., qui a émané de la plus haute juridiction portugaise et acquis force de chose jugée au Portugal, pays de la nationalité des époux, la Cour d'appel a violé l'article 509 du Code de procédure civile ;

ALORS QUI PLUS EST QUE la circonstance selon laquelle une décision de justice étrangère a statué sur le fondement de règles d'ordre procédural, ne lui confère pas une autorité moindre que si elle avait été rendue en application de règles de fond ; qu'en statuant dans un sens contraire, la Cour d'appel a violé l'article 509 du Code de procédure civile ;

ALORS ENCORE QUE l'ordre public international français, atténué lorsque le juge est saisi des effets en France d'une situation acquise sans fraude à l'étranger, ne s'oppose pas à ce qu'un mariage polygamique produise certains effets en France ; que le mariage de ressortissants portugais contracté au Portugal, en application de la loi portugaise, loi de leur statut personnel, confère aux époux une situation acquise sans fraude à la loi ; qu'en statuant dans un sens contraire, la Cour d'appel a violé l'article 509 du Code de procédure civile ;

ALORS ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHESE QUE tout jugement étranger produit en France des effets en tant que fait juridique, indépendamment de la vérification de sa régularité internationale par une procédure de reconnaissance ou d'exequatur ; qu'en refusant de prendre en considération le jugement portugais en date du 16 septembre 1996, dont il résulte que la validité du mariage de Monsieur X... et de Madame Olinda Y... ne peut plus être contestée en application de la loi portugaise, applicable à leur statut personnel, la Cour d'appel a violé l'article 509 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR REJETE la demande d'annulation de la décision prise par la Caisse d'assurance vieillesse des artisans, de suppression du versement d'une pension de réversion au profit de Madame Olinda Y..., épouse X... ;

AUX MOTIFS QU'il n'est pas établi que le premier mariage de Monsieur X... avait été dissous antérieurement à son second mariage avec l'appelante, de sorte que ce second mariage ne peut produire aucun effet notamment au plan du droit à une pension de réversion ;

ALORS QU'en cas de mariage d'un assuré, suivi d'un second mariage nul mais déclaré putatif à l'égard de la seconde épouse, celle-ci a la qualité de conjoint survivant au sens des articles L. 353-1 et L. 353-3 du Code de la sécurité sociale, et peut bénéficier du versement d'une pension de réversion ; qu'il en résulte que le juge appelé à se prononcer sur la qualité de conjoint survivant de la seconde épouse doit surseoir à statuer afin de faire juger par la juridiction compétente la question de la nullité, et de l'éventuelle putativité du mariage à son égard ; qu'en refusant à Madame Olinda Y... le bénéfice d'une pension de réversion au motif que la loi française n'admet qu'une seule épouse, la Cour d'appel violé les articles 201 du Code civil, L. 353-1, R. 353-1 et L. 353-3 du Code de la sécurité sociale.



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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Entériner
Putatif


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 11/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.